Foulques III, dit Foulques Nerra, fut comte d’Anjou de 987 à 1040. Batailleur réputé pour sa cruauté, il est l’un des personnages les plus extraordinaires du Haut Moyen-Âge. On lui doit plus de cent abbayes, églises, châteaux et donjons. Vers l’an mille, au retour d’un pèlerinage en Terre Sainte et en expiation de ses fautes, Foulques Nerra décide de bâtir à Beaulieu une abbaye bénédictine qu’il dédie à la Sainte-Trinité. Il concède aux moines la terre de Beaulieu, les droits de justice et de marché.
Foulques Nerra a presque 70 ans quand il achève son dernier pèlerinage, un âge très honorable à cette époque. Au retour de ce voyage, il meurt à Metz, le 21 juin 1040. Il est inhumé dans l’abbaye de Beaulieu.
L’abbaye, dont les biens étaient considérables, et la ville avec son marché, se développèrent. La cité pris de l’importance : au début du XIIIème siècle, Beaulieu comprenait trois paroisses : Saint-Pierre, Saint-Laurent et Saint-André. La ville était alors Beaulieu, Loches étant la cité militaire dont la garnison défendait et protégeait Beaulieu, son marché, ses moines et ses bourgeois.
Malheureusement, Beaulieu ne possédait pour se défendre qu’un mur d’enceinte peu efficace. Lors de la guerre de Cent Ans, la cité fut occupée par les Anglais en 1359 puis en 1412, les troupes du Duc de Clarence mirent à feu et à sang l’abbaye et brûlèrent la rue qui conduisait à Loches et que l’on nomme depuis « rue Brulée ». Le marché fut déplacé à Loches, vers un lieu mieux protégé, à l’abri des remparts. Avec lui partirent les revenus de l’octroi et des taxes sur les marchandises et les étals ! Les rois de France eurent beau promulguer des ordonnances, rien n’y fit, les marchés se tinrent à Loches et ce fut le début de la langueur de Beaulieu.
A la Renaissance, Loches devint cité royale et reçut dans ses murs la Cour et les rois, depuis Charles VII jusqu’à François Ier. Agnès Sorel, favorite de Charles VII, demeura à Beaulieu, dit-on, lors des séjours du roi au château de Loches.
Pendant les guerres de religion qui opposèrent catholiques et protestants, Beaulieu et son abbaye furent pillées par les Huguenots. Loches et Beaulieu souffrirent du détournement de la route d’Espagne par Tours. A la Révolution, il n’y avait alors plus que cinq moines pour assurer la survie de la communauté bellilocienne. L’abbaye fut morcelée lors de la vente des biens nationaux. L’église fut choisie comme siège de la paroisse et placée sous le vocable de Saint-Pierre-et-Saint-Paul. Les trois autres paroisses furent supprimées.
De tout temps, un artisanat varié assura la vie matérielle de la population. On comptait par exemple en 1885 quatre tailleurs de pierre avec une trentaine d’ouvriers, cinq sabotiers, trois charrons, un potier et quatre tanneries qui ont aujourd’hui totalement disparu. À la même époque, la culture des champignons se développa dans le dédale des carrières souterraines d’où fut extrait le tuffeau qui servit à construire les murs pendant des siècles. Cette culture spécifique aux caves, la production de mycélium et les conserveries furent toutes fermées dans les années 1980. Deux usines de transformation du caoutchouc s’installèrent également à Beaulieu.
La consécration de l'Abbaye de Beaulieu-lès-Loches par O. Guillhot